
LA VISITE DE LA BANQUE MONDIALE A L’UFRSEG EN QUELQUES POINTS
Publié le 06 Oct 2025
C’est ce jeudi 02 Octobre 2025 que la Directrice des Opérations de la Banque Mondiale pour la Côte d’Ivoire, Madame Marie-Chantal UWANYILIGIRA, s’est rendue à l’UFR de Sciences Économiques et de Gestion accompagnée d’une forte délégation. L’objectif de cette visite était de présenter le dernier rapport de la Banque sur l’économie ivoirienne intitulé : « Situation économique de la Côte d’Ivoire, Mobilisation des Recettes Fiscales : Catalyseur de Productivité et Transformation Économique ». Accueillie par le Doyen, le Pr. KONÉ Salif et son équipe, la délégation a pu présenter son rapport à la bibliothèque de l’UFR devant de nombreux enseignants et étudiants venus pour l’occasion. Dans la suite de notre synthèse, nous allons mettre en exergue les points essentiels de cette rencontre. Des performances économiques indéniables et un avenir prometteur… Le rapport commence par faire un état des lieux de l’économie ivoirienne et les résultats sont plus que satisfaisants. La Côte d’Ivoire se maintient sur une trajectoire ascendante avec une croissance de 6% en 2024, qui est au-dessus des moyennes régionales et mondiales, et une réduction de l’inflation de 3,5% en 2024. Le pays a également réussi à réduire le taux de pauvreté de manière significative, il est passé de 38,5% en 2020 à 36,5% en 2022, tout en réduisant le déficit budgétaire qui est passé de 5,2% du PIB en 2023 à 4% en 2024. Et la performance est la même au niveau du déficit du compte courant qui est aujourd’hui de 4,5% du PIB contre 8,2% en 2023.Ces bons résultats, portés par une dette publique soutenable et par des perspectives favorables à moyen terme, encouragent la Côte d’ivoire à rêver d’une croissance encore plus importante, plus soutenue et plus durable. 3,5 millions d’emplois créés, un taux de pauvreté réduit de 50% et un statut de pays à revenu intermédiaire de la zone supérieure… telles sont les ambitions du pays à l’horizon 2030. Le rapport le dit clairement : atteindre de tels objectifs n’ira pas sans un cadre budgétaire solide pour impulser l’accélération de productivité requise. Par ailleurs, une mobilisation de ressources substantielles sera nécessaire pour maintenir le cap des investissements existants et entreprendre de nouveaux investissements cruciaux dans les infrastructures et le capital humain. Mais dans un contexte mondial incertain où les tensions commerciales et les reconfigurations de l’aide et du financement internationaux sont de plus en plus fréquentes, les possibilités d’emprunt de la Côte d’Ivoire pourraient être potentiellement réduites. Dès lors, il semble plus que pertinent d’étudier de nouvelles sources de financement pour poursuivre la croissance. La fiscalité pourrait elle l’une de ces sources ? De grandes ambitions freinées par des recettes fiscales insuffisantes Tout comme l’emprunt à l’extérieur, la mobilisation des ressources intérieures reste une part essentielle du financement de la croissance dans un pays. Et pour augmenter ses recettes publiques, l’État peut notamment s’appuyer sur sa fiscalité. Durant la dernière décennie, la Côte d’Ivoire a fait des progrès remarquables dans ce domaine : le pays a effet augmenté régulièrement ses recettes publiques, qui sont passées de 12,8% du PIB en 2012 à 16,8% du PIB en 2024 et cela en grande partie grâce aux recettes fiscales qui ont représenté 85 % des recettes totales de l’État. Le rapport mentionne d’ailleurs qu’au cours de la dernière décennie, le système fiscal de la Côte d’Ivoire est passé de l’un des systèmes les moins sensibles à la croissance économique à l’un des plus réactifs parmi les pays comparateurs de la région. Malgré ces améliorations, les niveaux des recettes fiscales de la Côte d’Ivoire restent inférieurs à ceux des pays comparables. En effet, avec son ratio impôts/PIB d’environ 14%, la Côte d’Ivoire reste en deçà de l’objectif de 20% de l’UEMOA et de la moyenne de 21,7% pour les pays à revenus intermédiaire de la tranche inférieure. Et pour atteindre ses ambitieux objectifs de croissance, les études estiment qu’elle doit atteindre un taux situé entre 22 et 24% de son PIB. Plusieurs éléments expliquent cette situation dont notamment les disparités dans l’effort fiscal entre les secteurs et les types d’impôts (étude CAPEC), la présence de niches fiscales significatives (étude CAPEC), la prévalence et l’étendue du secteur informel ou encore les incitations fiscales généreuses accordées aux entreprises. Mais comment y remédier ? De nombreuses pistes à l’étude…. Tout en félicitant la Côte d’Ivoire pour ses progrès, le rapport mentionne quelques leviers qui pourraient permettre d’accélérer le processus. Il s’agit notamment de la mise en place structurée de la Stratégie de mobilisation des Recettes à Moyen Terme (SRMT) finalisée par le pays en mai 2024, de la réorientation des subventions vers des programmes ciblés et favorables aux plus pauvres, du renforcement de l’efficacité publique pour encourager le civisme fiscal ou encore d’un meilleur ciblage dans le système fiscal. De leur côté, les universitaires ont particulièrement insisté sur la question du civisme fiscal et sur la perception de l’impôt par les populations. En effet, les populations ne comprennent pas vraiment les apports de l’impôt dans leur vie quotidienne. Et pour cause… Si la moindre infrastructure construite leur est présentée comme un don de telle ou telle personnalité, comment comprendront-elles que c’est l’impôt, et donc leur contribution, qui a fait naître cette infrastructure ? Ajouter à cela la corruption qui leur donne l’impression que l’impôt n’est pas utilisé comme il se doit. Certains intervenants ont également insisté sur les dangers d’une pression fiscale trop forte sur la croissance des entreprises qui peinent déjà à émerger quand d’autres ont insisté sur l’importance d’une plus grande décentralisation de l’activité économique dans les autres villes du pays afin de mieux répartir la charge fiscale. En somme, la présentation de ce rapport a suscité des débats riches et prometteurs. D’autres présentations et échanges sont prévus à court terme. Et vous pourrez retrouver le rapport complet via le lien suivant : https://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2025/09/10/tax-revenues-are-catalyst-for-more-inclusive-growth-in-cote-divoire